Photo: Daniel Dupont
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20 janvier 2000
Humour et rumeurs résolument freudiennes
David Cantin
sources: Le Devoir
Deuxième création du Théâtre
Pupulus Mordicus de Québec, Les Enrobantes s'annonce
comme l'une des belles surprises théâtrales de l'hiver.
Au périscope à Québec, le texte de Marie-Christine
Lê-Huu jumelé à la passion pour le jeu marionnettique
de Pierre Robitaille et Véronique St-Jacques en
fait un rendez-vous incontournable.
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Il faut voir le plaisir, ainsi que l'exigence, de cette jeune troupe
qui peaufine un spectacle à partir de la rumeur de l'impuissance
sexuelle sans retour du père de la psychanalyse.
Véritable rencontre complice entre la marionnette et l'acteur,
cette pièce fait preuve d'unbe ingéniosité incomparable.
Elle résulte surtout d'une approche festive où le jeu
ainsique la présence de musiciens laissent entrevoir un drôle
de cabaret théâtral. En interrelation constante, ces marionnettes
sont manipulées à vue sans costume noir ni cagoule. On
étend, à juste titre, toutes les possibilités expressives
des interprète. Avec l'aide de Gill Champagne à
la mise en scène, ces créateurs-concepteurs n'hésitent
pas à se lancer sur les traces de cette enquête psychanalytique
curieuse dans le Vienne enivrant des années 30.
Toute cette comédie, débordante de clin d'oeil, pivote
autour du précieux document que le docteur Sygmund Freud cache
dans son cabinet; le compte rendu de son auto-analyse. On dit même
qu'il irait jusqu'à contenir les preuves de l'impuissance de
l'illustre spécialiste.
Alors que deux "bons aryens" de soldats nazis s'emparent de
ces feuilles précieuses, la trame prend des allures bouffonnes.
D'un pas déterminé, le docteur ira à leur poursuite
jusqu'au fond du cabaret de madame Guste, où il tombera sur le
divan charmeur de la somptueuse Lola.
Sur son chemin, on croise les silhouettes d'autres illustres psychanalystes
qui tentent d'en comprendre un peu plus sur cette affaire loufoque.
On comprendra qu'il est surtout question d'une drôle d'aventure
qui porte à réfléchir.Toutefois, au delà
d'une trame linéaire cocasse, c'est l'esthétique très
expressionniste des Enrobantes qui séduit tout au long
de la représentation. À ce titre, il faut saluer le travail
rigoureux des comédiens-manipulateurs que sont Martin Genest,
Anne-Marie Olivier, Pierre Robitaille et Véronique
St-Jacques. Entre l'excès et la finesse, le jeu ne manque
jamais d'audace. On découvre comment ces interprètes en
arrivent à surmonter les obstacles grâce à une approche
minutieuse. Il est étonnant d'observer la fougueuse Véronique
Saint-Jacques qui entraîne les autres dans une sorte de passion
commune. Sans jamais se faire prendre au sort de la caricature, l'histoire
permet un certain réalisme qui donne un ton à l'ensemble
du spectacle.
Autre atout des plus importants, le présence de Frédéric
Lebrasseur et Martin Bélanger, quelque peu en retrait,
installe une ambiance sonore qui relance sans cesse les scènes
entre elles. Grâce à ce travail avec des percussions et
un clavier, le rythme de la pièce se rassemble de manière
adéquate. Ces effets sonores offrent ainsi aux marionnettes de
nouvelles possibilités. Quant au décor, on construit le
spectacle sur les coffres qui permettent de déjouer l'illusion
théâtrale.
On souhaite voir d'autres troupes comme le Théâtre Pupulus
Mordicus. Ce collectif de comédiens et d'artistes de disciplines
diverses enchante et semble se nourrir d'une même passion, celle
d'approfondir un art ainsi qu'un jeu qui convoque le spectateur à
un vertige émotionnel. De l'humour à une pratique théâtrale
des plus intéressantes, Les Enrobantes au Périscope
à Québec ne peut qu'être propice au succès.
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